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17/03/2016

Une visite inattendue

Une visite inattendue

 

Cinq jours à La Havane nous ont suffi pour apprécier l’ambiance de cette capitale cubaine malheureusement en chantier. La ville est en effervescence en vue de deux événements importants qui se rapprochent : la venue de Barak Obama et le concert des Rolling Stones. Le jour de notre arrivée, la plupart des rues et avenues étaient éventrées probablement pour y installer ou renouveler câblage Internet, voire téléphone car ici, la plupart des cubains se servent des téléphones publics disparus de notre environnement géographique depuis belle lurette ! Beaucoup de bâtiments sont aussi en rénovation et il est grand temps car tout un patrimoine architectural est manifestement en danger faute de moyens. Bref, beaucoup de poussières mais aussi une démonstration d’efficacité des travailleurs cubains. Une rue éventrée le matin est déjà refermée le lendemain, câbles posés !

Les cubains sont en général très sympas mais quelque peu harceleurs. On s’y habitue et surtout, on s’y adapte. Plutôt que refuser le dialogue, on les éconduit gentiment en trouvant une excuse. Mais surtout, on négocie car les prix sont le plus souvent d’abord annoncés le double, le triple ou encore plus de ce que nous avons effectivement payé ! Il faut s’y faire et surtout ne pas casser le marché en acceptant n’importe quoi… Pas toujours facile.

Toutes ces journées où nous avons déambulé (merci ma prothèse qui est maintenant totalement rôdée) dans ces rues pittoresques ont été émaillées de surprises : surprises visuelles (il faut voir une fois au moins dans sa vie un étal de boucherie cubaine !), surprises auditives (ça chante et ça danse quelle que soit l’heure de la journée), surprises olfactives (ça cuisine partout et on peut dire que si l’escale à La Havane peut difficilement être qualifiée de gastronomique, il y a quelques restaurants à découvrir où la gentillesse du service compense un peu, à quelques exceptions près, la monotonie des menus). Bref, si La Havane ne fut pas ma ville cubaine préférée, je lui reconnaît une certaine originalité qui lui donne ainsi contrairement peut-être à Santiago de Cuba et Cienfuegos à mon sens plus authentiques, un petit air de capitale.

Pour le retour, nous avions fixé rendez-vous avec notre taxi qui nous prend en charge avec un passager supplémentaire non prévu dans notre accord. Cela aussi, c’est Cuba ! Marjo apprendra que la course lui a été proposée pour lui seul au même prix que celui négocié pour nous deux ! Bref, nous voilà repartis pour 350 kms de slalom entre les nids de poule que le conducteur semble connaître par cœur négociant habilement dépassements et évitement d’obstacles. Il n’est pas rare de partager l’autoroute avec des attelages, des vélos, des piétons ! Un vrai dépaysement !

superyacht.jpgQuitte à partager notre véhicule, autant le faire dans la convivialité. Le conducteur n’étant guère loquace, Marjo engage la conversation en anglais avec notre passager qui s’avère être un Ecossais, d’entrée de jeu plus sympathique que moi qui lui demande de bien vouloir s’abstenir de fumer ! Plutôt que d’être enfumé pendant plus de trois heures, j’ai choisi d’imposer mon choix quitte à passer pour un mauvais coucheur ce qui ne fut pas le cas, l’homme se pliant immédiatement et avec le sourire à ma demande. Occupé à taper un rapport de terre/mer sur mon ordinateur, je laisse traîner mes oreilles et apprends ainsi que Terry – c’est son prénom – est Second sur le maxi yacht amarré cul à quai à la marina de Cienfuegos. Durant tout le trajet, il n’y eu pas beaucoup de blancs dans la conversation. Notre écossais était disert, Marjo égale à elle-même et moi, tapotant mon clavier comme un autiste, j’intervins très peu. J’étais à l’écoute cependant et parvins à demander s’il était vrai que les Ecossais ne portaient pas de sous-vêtement sous leur tartan. Sa réponse fut appréciée dans un éclat de rire car il déclara que s’il est vrai que les Ecossais traditionalistes ne portent pas de sous-vêtements, lui n’en est pas un, trouve que le tissu des kilts est très agressif et martyrise son épiderme, raison pour laquelle il porte toujours un caleçon !

Arrivés sans encombres à Cienfuegos, nous étions presque devenus amis et, le propriétaire du grand voilier[1] étant absent, Terry nous proposa d’en faire la visite. Rendez-vous fut pris et honoré le lendemain où nous pûmes visiter ce prestigieux ketch de 40 m, visite au cours de laquelle, tout en admirant, sans en partager le goût, les luxueux aménagements, nous pûmes réaliser combien la comparaison entre un tel voilier et le nôtre s’arrête à ce que les deux navires naviguent à la voile ! Un tirant d’air de plus de 40 m, un moteur Mercédès de 515 chevaux, un tirant d’eau de 3,50m… Je vous fais grâce d’un descriptif complet que les amateurs peuvent facilement trouver sur Internet. Combien ça coûte ? Beaucoup d’argent. Un Capitaine, un Second, un ingénieur, une hôtesse, deux équipiers, s’occupent du bateau sans relâche qu’il navigue ou ne navigue pas. Je n’ai retenu que la somme nécessaire à son fonctionnement annuel : deux millions de dollars ! Pour remercier Terry de cette inattendue possibilité de visite, nous l’invitâmes à notre bord pour un « sunset party » que nous n’oublierons pas de sitôt. La soirée fut arrosée, enjouée, racontée, partagée, la conversation s’inscrivant dans un esprit de sympathie réciproque. Nous en apprîmes ainsi les avantages mais aussi les vicissitudes de la vie des marins au service des nantis. Je relèverai, dans les quelques indiscrétions évoquées, que le propriétaire, lorsqu’il est à bord s’assied dans son salon et consulte pendant de nombreuses heures, ses journaux financiers et autres mais surtout financiers, tenez-vous bien, imprimés à bord !!! Il faut bien que son immense fortune vienne de quelque part ! Quant à la voile, il s’y intéresse fort peu. De temps à autre, il encourage l’équipage à pêcher car il refuse de manger quoi que ce soit qui a été congelé. Il offre parfois 200 $ au premier qui lui sort un thon, une dorade ou autre bonite !

En ce qui concerne le voilier proprement dit, jamais ses routes ne sont établies en fonction du vent et les navigations se font donc au moteur appuyé par les voiles chaque fois que cela est possible. Il passe ainsi des Caraïbes à la Méditerranée selon les caprices du proprio qui n’a jamais traversé une seule fois préférant retrouver son beau voilier là où il le souhaite !

A Cuba, pendant son court séjour avec sa femme et ses enfants, son jet privé reste en standby au cas où les événements se précipiteraient et qu’il devrait quitter en hâte le territoire. Pendant ce temps, je suppose que le pilote se tourne les pouces et/ou prend du bon temps accroché à son portable… Décidément, la vie est bien plus belle à bord de l’Otter II

 

[1] Par souci de discrétion et afin d’éviter d’éventuels ennuis à notre nouvel ami, nous avons choisi de taire le nom du bateau.

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