28/09/2013
Où sommes-nous ?
Perchés sur notre bateau posé sur sa quille et bien qu'il nous reste encore un tas de choses à faire, nous nous impatientons. Notre remise à l'eau est prévue pour lundi. Hier, nous avons briqué le pont et nous sommes occupés des inox qui, ici, comme la saison passée, soufrent beaucoup. L'air est chargé de substances parfois très odorantes rejetées dans l'atmosphère par la raffinerie toute proche. Peut-être est-ce cela qui s'attaque aux métaux. En tout cas, nous nous réjouissons de ne plus le respirer. La saison passée, nous étions dans le même état d'esprit. Bientôt, ce ne sera plus qu'un mauvais souvenir. A l'heure où j'écris ce petit rapport (09h20), malgré un Alizé soutenu de 20-25 noeuds qui rafraîchit l'air, celui-ci reste chaud. Très chaud. Saharien ! Impossible de se balader au soleil sans se protéger. T-shirt, chapeau, lunettes solaires incontournables ! Je vous assure et ce n'est pas pour me plaindre car je m'adapte mais il fait vraiment très chaud. (A me lire, commencez-vous à transpirer ? Ne vous inquiétez pas c'est l'effet recherché. Je suis très partageur ;-)
Donc, nous allons intelligemment attendre que le soleil soit quelque peu descendu sur l'horizon (environ 16h00) pour pointer notre nez dehors et poursuivre notre travail sur Otter II. Je dois monter au sommet du mat pour le nettoyer en redescendant pendant que Marjo poursuivra la remise en état des chandeliers et autres pièces métalliques comme les manches à air. En attendant, je rédige du courriel, et joue mon fan de FB. Je cours aussi visiter les sites de bateaux amis pour avoir des nouvelles. Bref, je me mets en stand-by. Marjo est dans le même état avec son iPad. Difficile de dire si elle lit ou si elle communique. Ici, on profite d'une excellent connexion pour prolonger un peu le plaisir d'Internet en sachant très bien que cela ne durera pas.
Question santé, tout va bien si ce n'est que les kilos accumulés en Europe se font bien sentir par cette chaleur et l'essoufflement est bien vite au rendez-vous ! Cela ne durera pas car j'ai l'impression de vivre une fonte systématiquement entretenue, et par le soleil, et par Marjo qui nous a remis au régime croisière c'est-à-dire délicieux mais frugal. A bientôt les photos pour le résultat. Pour l'instant il n'y a rien à voir !...
17:21 Écrit par Otter2 dans Journal de bord, Rapport de terre/mer | Lien permanent | Commentaires (2) | Facebook |
24/09/2013
citation de JFK
Il est un fait biologique intéressant que chacun d’entre nous ait dans les veines un pourcentage identique de sel dans le sang à celui qui existe dans les océans, nous avons donc tous du sel dans notre sang, dans notre sueur, dans nos larmes. Nous sommes liés à l’océan. Et quand nous retournons à la mer – que ce soit pour naviguer ou pour la regarder, nous retournons d’où nous venons.
-John F. KENNEDY
13:15 Écrit par Otter2 | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
21/09/2013
21 septembre 2013 : états d'âme
Ce samedi 21 septembre 2013.
C’est parti. Nous sommes dans le train entre Liège, ma bonne ville que j’aime tant , et Bruxelles. Je suis assis par terre dans le sas d’entrée car le train est bondé. Je vois défiler à travers la vitre de la portière, le paysage hesbignon dont je m’imprègne une dernière fois avant longtemps. J’ai l’âme en deuil de mes chers enfants et petits-enfants, de mes si généreux beaux-parents et de mes si gentilles belle-sœurs venues spécialement de Madrid pour nous dire au revoir. Ma fille était sur le quai et avait l’air un peu perdue. Et moi, retenant mes larmes, je ne valais pas mieux… Le paysage défile. Je regarde Marjo qui est déjà dans le voyage, toute préoccupée qu’elle est de ne pas se tromper dans l’imbroglio de correspondances imposées aujourd’hui par des travaux sur les voies ferrées de Maastricht. Car nous allons rallier Schipol via Bruxelles, Anvers, Rosendaal. Une nuit à l’hôtel puis un bond jusque Aruba et enfin Curaçao. Pendant ce temps, mon fils Julien s’envolera pour la Chine ! Je pense qu’avant que l’on se rapproche par l’ouest, nous n’aurons jamais été aussi éloignés l’un de l’autre.
Et tous nos chers amis et amies . Combien de temps allons-nous être privés de leur fraternelle amitié ? Nous ne le savons même pas nous-même. Le voyage est ainsi fait de surprises et de rebondissements qui nous forcent à nous adapter, à effectuer des choix et à glaner tout au long du chemin, toutes informations propices à orienter ceux-ci.
Quand reviendrons-nous au pays ? Ce troisième départ est, pour moi, plus difficile que les autres. Il arrive alors que tous nos parents et amis ainsi que nous-même, partons avec l’expérience, non pas des deux précédents départs mais plutôt du vécu des deux longues périodes précédentes de séparation. Seule la découverte de nouveaux paysages, de nouveaux visages, de nouvelles rencontres nous console de cette douloureuse séparation.
Bruxelles. On vient de changer de train. Nous sommes assis et mon spleen se dissout lentement dans ce voyage dans lequel mon esprit s’installe. De nouveau en projet, je pense à notre arrivée et au travail de préparation du bateau qui nous attend. Je pense à nos amis hollandais du Betty Boop, que nous allons retrouver effondrés à Spannish Water (splendide mouillage de Curaçao). Ils ont été touchés par la foudre et toute l’électronique ainsi que l’électricité du bateau est HS. Hormis le coût financier, il y a le coup au moral. Leur mésaventure fait partie de nos doutes. Cela peut aussi nous arriver. Ayant déjà été foudroyés il y a des années dans le port des Minimes à La Rochelle, peut-être avons nous statistiquement moins de chance que cela se reproduise. C’est sans compter que la foudre frappe au hasard et nul n’est à l’abri. On ne peut que croiser les doigts.
Nous voilà donc vraiment en route, confortablement assis cette fois dans une voiture de chemin de fer presque neuve, donc ultra moderne. Nos amis flamands seraient-ils privilégiés ? En bon Wallon, je me pose la question. Mais c’est certainement encore le hasard qui est seul responsable. Soyons-en persuadés et contentons-nous d’en profiter !
(à suivre)
15:55 Écrit par Otter2 dans Journal de bord, Rapport de terre/mer | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
05/09/2013
citation
"Le vrai voyageur n'a pas de destination. Il se contente de suivre la route qui se dessine sous ses pas."
Kim Hafez
18:43 Écrit par Otter2 | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
03/09/2013
Deux bateaux s’aimaient d’amour tendre…
Deux bateaux s’aimaient d’amour tendre… à l’insu de leurs propriétaires.
Il était une fois l’Otter II, Hans Christian 43T[1], que son équipage, Marjo et Jean, avait prêté à un chantier lorientais pour l’aider à donner vie à d’autres beaux bateaux comme lui. Ils ignoraient que leur Ami supporterait mal l’éloignement de la merveilleuse rivière de Pénerf où il se sent si bien en été. Il était nostalgique, ne côtoyant dans le vieux port, hormis son nouvel ami Yves, que des bateaux de passage, pas toujours beaux et pas toujours bien élevés. Enfin, il se faisait une idée de tout cela, prenant son mal en patience en attendant de pouvoir prendre le large. Il était mélancolique et tirait mollement sur ses amarres…
Un beau jour, son cœur soudain s’accéléra. Une belle unité, racée comme lui mais un peu plus petite, vint prendre place à un ponton situé non loin de lui, à peine une encablure l’en séparait. « Elle est belle et très jeune », se dit-il. À partir de ce moment, il n’a d’yeux que pour elle. Il n’en peut plus de tirer sur ses amarres en l’absence toujours trop longue de son skipper. Impossible de lire son nom. Encore moins de le lui demander. Tout le monde sait que les bateaux ne peuvent que murmurer à l’oreille des seules personnes qui les aiment et les écoutent. Un beau jour, la belle est prise en charge par de nouveaux propriétaires et quitte Lorient. Otter la regarde s’éloigner avec tristesse mais l’image de son nom peint sur sa fesse gauche, ne le quitte plus : « La Clémence ». « L’a-t-elle seulement remarqué ? », se dit-il. Plein d’espoir, il pense qu’un jour peut-être, il la reverra.
L’été venu, quittant la rade de Lorient pour son vagabondage estival, Otter n’a qu’une seule idée : la retrouver au détour d’un cap, d’une baie ou l’attendre dans un merveilleux mouillage. Son barreur le trouve bien fringuant en ce début de croisière. Il ignore encore que son meilleur Ami est amoureux. Et d’ailleurs, est-ce bien raisonnable de penser qu’un bateau puisse l’être ?
À la fête de la mer de Pénerf, Otter est tout pavoisé. Ses propriétaires l’ont décoré. Outre son grand pavois[2], il arbore tous les pavillons de courtoisie gagnés au cours de ses nombreux voyages. Les bateaux à faible tirant d’eau ne sont pas, comme lui, contraints de rester amarrés à leur corps-mort. Ils tournent autour de lui avec élégance. Tous ont revêtu leurs plus beaux atours. Les feux de Bengale, les cornes de brume, les chants de marins, le son des binious du bagad[3] venu pour la circonstance, donnent à la fête tout son panache pendant la bénédiction de la mer.
Mais Otter est toujours un peu triste. Certes, il a beaucoup navigué. Ses propriétaires l’ont emmené jusqu’au Portugal. Mais partout où il est allé, nulle part il n’a aperçu La Clémence. « La reverrai-je un jour ? », se lamente-t-il.
Soudain, alors que tous les vieux gréements appareillent pour aller faire la fête au Croisic, La Clémence est là. Sa grand voile haute, timidement, elle tourne autour de lui. Il entend à peine ce que les personnes se disent des deux bords. Il est sous le charme… À peine rencontrée, la voilà qui s’éloigne encore et disparaît lentement, empruntant la passe de l’Est.
Plusieurs jours plus tard, alors qu’il continue à se reposer un peu trop à son gré, Marjo et Jean lui cherchent un nouvel endroit où passer l’hiver moins loin de sa belle rivière. Ils n’en parlent guère, lui réservant la surprise ! Ainsi, à la fin du mois d’août, l’Otter II dirige son étrave vers un endroit merveilleux qu’il connaît déjà : une autre rivière, mieux abritée : la belle Vilaine qu’il remonte jusque La Roche-Bernard.
Alors qu’il vire de bord vers le vieux port où l’attend son nouvel emplacement, Otter distingue le beaupré[4] caractéristique d’un Hans Christian. Un doute surgit : « Serait-ce La Clémence ? »
Amarré avec soin à côté du bateau restaurant et presqu’en face de la capitainerie, l’Otter est tout excité. Il est presque certain que c’est la Clémence qu’il a vue. Il n’y a plus qu’à attendre. Le hasard fera bien les choses. Et comme dans toutes les belles histoires d’amour, ce sont souvent les demoiselles ou les dames qui prennent l’initiative…
Voilà donc qu’arrive dans son cockpit, le plus beau cadeau que Otter ait reçu de toute sa vie :
« Dans le port de Lorient
Parmi les goélands,
Tu paraissais si grand
Si fort et triomphant.
Je voulais t’attirer
Tout au moins essayer,
Te parler d’amitié,
Peut-être me faire aimer.
J’étais intimidée,
Dans mes petits souliers,
Je n’osais t’approcher,
Encore moins t’aborder.
Je suis un peu joufflue,
Et je sais que mon cul
N’est pas vraiment pointu
Ni mes hanches menues.
Je ne saurais te plaire,
Mais ne suis pas amère,
Et je saurais bien faire
Ma vie sans ton aussière
Je suis heureuse en mer,
Et puis, sous le ciel clair
J’aime à croire, cher OTTER
Que tu es mon grand frère
« Mon grand frère, mon grand frère ! Facile à dire cela après m’avoir tout émoustillé… »
Gageons que le grand frère n’a pas dit son dernier mot et regrettons ensemble que l’on ne puisse conclure :
ils furent heureux et eurent beaucoup d’enfants !
Jean LUMAYE
[1]Type de bateau inspiré des premiers bateaux de sauvetage norvégiens dessinés par Colin Archer. / 43 est la longueur en pieds soit environ 12,50 m. / T pour traditionnel.
[2] Le grand pavois désigne la décoration des bateaux à l’aide de pavillons qui, avant l’invention de la VHF, servaient à la communication. Ces pavillons se hissent les uns derrière les autres et se répartissent de la poupe (du cul – on peut le dire d’un bateau sans vulgarité - ) à l’étrave en passant par la pomme du ou des mats. Ce grand pavois ne peut être arboré qu’au port et uniquement aux fêtes officielles ou après demande dûment effectuée auprès de la capitainerie locale.
13:29 Écrit par Otter2 | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |